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Sainte Hildegarde de Bingen - Scivias
17 septembre 2016

L’aspect sombre de la vie

La vie n’apporte pas toujours joie et bonheur, bien au contraire ! La joie et le bonheur, pour exister, demandent que l’on soit prêt à lutter, à souffrir, à accepter les blessures. La santé ne faisant pas mal, on la tient généralement pour acquise. Chacun de nous est néanmoins heureux et reconnaissant de constater un jour que ses blessures sont guéries et que les bagarres sont derrière lui. La vie n’est certes pas de tout repos. Souvent l’âme y erre et lutte à la manière d’un étranger pris dans l’ombre de la mort. Souvent l’âme y erre et lutte à la manière d’un étranger pris dans l’ombre de la mort. La vie nous conduit tous à travers des hauts et des bas ; nous franchissons montagnes et vallées, nous nous trouvons projetés tantôt en avant tantôt en arrière au milieu d’une mer démontée. Dieu, néanmoins, est sans cesse avec nous.

Hildegarde voit la vie de tous les jours d’une manière extrêmement réaliste ; l’existence humaine parfois ressemble non pas à un jardin de roses mais à une porcherie. L’enluminure du cerf-volant d’or représente également sur la partie droite, au-dessous d’une tente de couleur or, quatre scènes, qui illustrent on ne peut mieux la manière dont elle appréhende la vie.

L’être humain y est d’abord décrit comme un étranger marchant sur le chemin de l’erreur, de sorte que des monstres l’ont emmené de force à l’extérieur de la tente d’or et entraîné vers un lieu d’horreurs et de cruauté. Ils lui ont passé une énorme chaîne autour du cou et l’ont précipité dans une porcherie. Mais notre homme réussit à s’échapper. Ses ennemis toutefois le rattrapent et le précipitent alors dans un pressoir où il subit les pires tortures, se voyant peu à peu vidé de son sang. Là encore, il parvient à s’échapper, et pourtant il n’est pas au bout de ses peines car d’autres calamités s’abattent sur lui, cette fois sous la forme de scorpions, de vipères, de toutes sortes d’animaux dangereux (symboles d’attaques virales et de toute sortes de maladies). Hildegarde décrit ici l’âme prise de désespoir : « Comment vais-je pouvoir briser mes chaînes ? Qui va me libérer de cette prison ? Qui va s’inquiéter de mes blessures ? Qui va avoir pitié de mes souffrances ? Je suis pareille à un étranger que personne ne vient consoler ni aider. Qui pourrait me secourir ? Vers où vais-je fuir ? Mes souffrances sont incommensurables. Je me penche sur mes blessures et souffrances, et je pleure, pleure si fort que toutes mes blessures sont couvertes de mes larmes. »

Au bout du compte, l’âme invoque sa mère, l’aspect féminin de Dieu. Et celle-ci lui indique un sentier escarpé mais donnant accès à une grotte où elle pourrait aller se réfugier. Cette grotte symbolise évidemment le sein maternel, le retour au paradis, la vraie demeure de l’âme. Mais un parfum suave, aussi doux que de l’or, atteint les narines de l’âme, de sorte qu’elle se sent suffisamment forte pour quitter la grotte et emprunter un sentier terriblement étroit, plein d’épines et présentant nombre d’autres obstacles. Notre âme parvient ainsi au sommet d’une haute montagne, où elle distingue au-dessous d’elle un lac écumeux, des rivières. Comment, se dit-elle pourrais-je parvenir sur l’autre rive ? D’autres vipères et scorpions, des dragons, toutes sortes d’animaux surgissent devant elle, et une légion de diablotins, langues tirées, qui crient : « Réveillons nos talents et encerclons-la, afin que cette fois-ci elle ne nous échappe plus. » Terrifiée, désespérée, l’âme se tourne vers sa mère et lui crie son besoin d’aide : « O mère, où es-tu ? » Et Dieu, bien sûr, ne reste pas inactif, cette fois Il (son aspect féminin) procure à l’âme le soutien le plus puissant qui soit, à savoir une paire d’ailes, symbole de mobilité, afin qu’elle puisse franchir sans encombre les montagnes les plus élevées : « Dépêche-toi, âme, parce que Dieu t’a donné des ailes et personne ne pourra plus t’immobiliser. Vole prestement au-dessus de tous ces animaux venimeux, capables de te faire périr. »

Wighard STREHLOW, La guérison du corps et de l’esprit selon Hildegarde de Bingen, Saint-Jean-de-Braye, 2002, Editions Dangles, p. 46-48.

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