LE RAIFORT (Merrich)

Le raifort est chaud ; lorsque, au mois de mars, toutes les herbes reverdissent, le raifort s’adoucit, pendant un temps assez court, et alors il est bon à manger pour les gens sains et forts, car il renforce en eux la verdeur des humeurs bonnes. Mais, une fois qu’il a commencé à durcir et qu’il a beaucoup d’écorce, il devient dangereux d’en manger, car il n’a plus de verdeur et alors il dessèche l’homme comme si celui-ci mangeait du bois. C’est pourquoi il ne faut pas en manger, mais simplement en sucer le suc, s’il y en a, et recracher le reste. 

Si quelqu’un qui est maigre et sec veut manger du raifort, qu’il en prenne modérément, et il en sera un peu fortifié ; mais qu’il n’en prenne pas trop, car cela lui ferait du mal, étant donné qu’il n’a en lui que des forces modérées. 

Quand le raifort est vert, il faut le faire sécher au soleil et lui ajouter de la poudre de galanga : si on souffre du cœur, prendre de cette poudre avant et après les repas, et on ira mieux. Si on souffre du poumon, prendre de cette même poudre, avant et après le repas, dans du vin chaud ou de l’eau chaude, et on guérira. 

Hildegarde de Bingen, Le livre des subtilités des créatures divines, Physique, Les plantes, les éléments, les pierres et les métaux, Traduit du latin par Pierre Monat, Editions Jérôme Million, Grenoble 2002, p.125-126